Vaincre la désinformation et impliquer les communautés dans la campagne de vaccination contre la poliomyélite au Zimbabwe

Résumé

Cet article explore la réussite de la lutte contre la désinformation et l'implication des communautés dans la campagne de vaccination contre la poliomyélite au Zimbabwe, grâce à des interventions stratégiques de changement social et comportemental (CSC).

Un exemple de réussite – Vaincre la désinformation et impliquer les communautés dans la campagne de vaccination contre la poliomyélite au Zimbabwe

En 2023, le Zimbabwe a été confronté à une situation d’urgence sanitaire particulièrement grave lors de la survenue du poliovirus circulant de type 2 dérivé d’une souche vaccinale (PVDVc2), contraignant le Ministère de la santé et de la protection de l’enfance à réagir sans délai. Les autorités ont mis en place une campagne de vaccination en deux phases s’appuyant sur le nouveau vaccin antipoliomyélitique oral de type 2 (nVPO2), lancée début 2024. Toutefois, la campagne a été mise à mal par un climat de désinformation et de réticence vaccinale.

Combattre la désinformation grâce à une campagne stratégique dans les médias

Media delegates at the media engagement meeting
Des représentants des médias présents lors de la réunion à l’attention des journalistes

Lors du coup d’envoi de la campagne de vaccination, des informations biaisées ont aussitôt envahi les plateformes des réseaux sociaux, abreuvées de nouvelles alarmantes et de rapports inexacts. Cette publicité toxique menaçait de miner les efforts de vaccination en répandant un climat de défiance et de peur au sein de la population. Consciente du caractère urgent de la situation, l’équipe chargée des stratégies de changement social et comportemental a décidé de revoir le narratif de la politique de la communication de crise.

The UNICEF Zimbabwe team at the crisis communication meeting in Harare
L’équipe du bureau de l’UNICEF au Zimbabwe lors de la réunion portant sur la communication de crise (Harare)

C’est ainsi qu’elle a mis en place des réunions de haut niveau avec les parties prenantes du secteur des médias aussi bien publics que privés. Ces séances ont servi de plateformes de dialogue, dans le cadre desquelles les acteurs de la santé, y compris les représentants de l’Initiative mondiale pour l’éradication de la poliomyélite et du Groupe consultatif technique national sur les vaccinations du Zimbabwe (ZimNITAG), ont pu apporter des informations factuelles actualisées concernant la flambée de poliomyélite. En comblant les lacunes et en balayant les doutes exprimés par les médias, ces initiatives ont contribué à l’essor de pratiques journalistiques responsables et fondées sur les faits, ce qui a grandement contribué à un renversement des perceptions au sein du public.

Solliciter l’appui et la compréhension des instances confessionnelles

En pleine campagne, il est devenu manifeste que certaines communautés religieuses affichaient des doutes quant à la vaccination, nourris par des idées fausses ou des croyances dogmatiques. Pour les contrer, l’équipe chargée des stratégies de CSC a mis en place des dialogues interconfessionnels dans les provinces de Manicaland et Masvingo, visant à éclairer les chefs religieux sur l’importance et le caractère sûr des vaccins contre la poliomyélite.

Ces réunions ont été décisives en ceci qu’elles ont rétabli la confiance et permis d’obtenir le soutien des dirigeants religieux, en en faisant les défenseurs de la vaccination au sein de leur communauté. Les discussions ont non seulement favorisé la sensibilisation, mais aussi levé les craintes et brisé les mythes entourant les vaccins, tout en encourageant la coopération des populations au service de la vaccination.

Des participants à l’écoute lors d’une réunion de mobilisation interconfessionnelle dans la province de Manicaland.
Des participants à l’écoute lors d’une réunion de mobilisation interconfessionnelle dans la province de Manicaland

Le suivi et la prise en charge de la réticence vaccinale

Pour faire face efficacement aux difficultés continues soulevées par la réticence vaccinale, l’équipe chargée des stratégies de CSC a mis au point des outils innovants destinés à observer l’évolution de l’opinion de la population et à répondre à ses doutes.

HPM-EPI, PHPOs and Polio SBC Consultants during the SBC breakaway session
Des consultants HPM-EPI (modèles de promotion de la santé et programme élargi de vaccination), PHPO (bureaux de la santé publique et de la population) et des agents chargés des stratégies de CSC lors de la séance en petits groupes consacrée au CSC
  • Instrument de suivi des refus de vaccination en temps réel : Cet outil en ligne a permis d’enregistrer de façon détaillée les refus de vaccination. Il offre un aperçu instructif des raisons expliquant la réticence et sert de base à la mise en place d’interventions ciblées.
  • Système de gestion des rumeurs : En surveillant la diffusion et la nature des faits de désinformation, ce système a permis à l’équipe chargée des stratégies de CSC de contrer la propagation des rumeurs et de moduler sa politique de communication en conséquence, afin de s’assurer que des messages factuels et rassurants atteignent la communauté.
An International SBC Consultant presenting on the SBC tools for Polio outbreak response
Un consultant international chargé des stratégies de CSC présentant les outils CSC pour gérer les flambées de poliomyélite

Impact et réussite des interventions

Les interventions stratégiques ont collectivement contribué à la réussite indiscutable de la campagne de vaccination. À l’issue de la deuxième phase en mars 2024, le Zimbabwe avait vacciné plus de 4,7 millions d’enfants, dépassant de 13,2 % l’objectif fixé, avec un taux de couverture de 113,2 %. Ce résultat exceptionnel a mis en lumière l’efficacité des stratégies de communication et de participation de la population déployées par le secteur de la santé, selon une approche holistique.

La campagne de vaccination contre la poliomyélite menée au Zimbabwe illustre la puissance que revêtent une communication et une participation communautaire efficaces dans la résolution des enjeux de santé publique. Grâce à une démarche proactive vis-à-vis des médias, à une coopération avec les autorités religieuses et à des outils de suivi innovants, le Zimbabwe a non seulement contrecarré les actes de désinformation, mais aussi bâti les fondations d’une politique participative mue par la confiance mutuelle, posant les jalons de futures initiatives en faveur de la santé.