Des héros en première ligne : Atteindre chaque enfant dans l’État de Mer Rouge au Soudan

Résumé

Cet article met en lumière les efforts des héros de première ligne dans l'État de la mer Rouge au Soudan pour vacciner chaque enfant contre la polio, malgré les défis posés par les conflits et les déplacements.

Des héros en première ligne : Atteindre chaque enfant dans l’État de Mer Rouge au Soudan

Gravir des montagnes pour enrayer la propagation du poliovirus

C’est le premier jour de la campagne de vaccination contre la poliomyélite dans l’État de Mer Rouge au Soudan, où le poliovirus a été détecté dans des échantillons d’eaux usées au début de 2024. Les agents de vaccination se mettent en route aux premières lueurs de l’aube, équipés de porte-vaccins débordant de blocs réfrigérants et de flacons de vaccin antipoliomyélitique oral et de vitamine A, pour aller à la rencontre des enfants de leur communauté. Leur objectif est de vacciner chaque enfant de l’État âgé de moins de 5 ans au cours des quatre journées de campagne. 

Le conflit qui secoue le pays depuis avril 2023, a ébranlé les infrastructures sanitaires et les services de vaccination. Des centaines de milliers d’enfants n’ont pas été vaccinés et se trouvent donc exposés à des maladies évitables par la vaccination telles que la poliomyélite. Les déplacements massifs de populations ne font qu’aggraver la situation.

Lorsque la découverte d’échantillons positifs de poliovirus a été confirmée, le Ministère fédéral de la santé, épaulé par l’OMS et l’UNICEF, s’est empressé de réagir. Après avoir mené des enquêtes approfondies et des évaluations des risques, une équipe d’experts techniques a été déployée pour cartographier les zones à haut risque du pays en vue d’y mener des interventions. 

Au moment du lancement de la campagne dans l’État de Mer Rouge, les communautés en connaissaient les objectifs. Les agents de mobilisation sociale ont saisi toutes les occasions de visiter et de sensibiliser les communautés à la vaccination contre la poliomyélite.

Des messages ont été diffusés à la radio et par l’intermédiaire de haut-parleurs installés sur des véhicules qui ont circulé dans les villages, afin d’exhorter les parents et les personnes s’occupant d’enfants à faire vacciner les enfants âgés de moins de 5 ans dans le cadre de la campagne à venir. Les équipes de santé ont travaillé en coopération avec les partenaires pour atteindre les enfants issus de familles déplacées. 

Aucun enfant n’est trop loin : vacciner jusque dans les montagnes

Au centre de santé d’Agig, Mahmoud, qui travaille comme agent de santé et de vaccination depuis dix ans, récupère les vaccins pour la zone de couverture dans laquelle il doit intervenir le troisième jour de la campagne. 

Il prévoit de se rendre auprès des communautés itinérantes et difficiles à atteindre de la vallée de Barqiq, au cœur des montagnes qui bordent la frontière avec l’Érythrée, à quelque 40 kilomètres du centre de santé le plus proche. Ces communautés restent dans les montagnes jusqu’au début du mois de mai. Puis, l’été, elles voyagent vers les zones rurales de l’État de Kassala. 

« Étant donné que ces populations sont constamment en déplacement, leurs enfants risquent de manquer les activités de vaccination », explique Mahmoud. « Cela signifie que nous devons les atteindre au plus vite. » 

Une fois les vaccins placés en toute sécurité dans des glacières et des porte-vaccins pour les maintenir à la température idéale, l’équipe entreprend le périple qui mène d’Agig à la vallée de Barqiq. S’ils voyagent d’abord en voiture, les routes de plus en plus cahoteuses et étroites les contraignent à se déplacer à dos de chameau ou d’âne pendant les deux dernières heures du trajet. 

Goutte à goutte, les enfants sont protégés

Lorsque Mahmoud et son équipe arrivent dans la vallée, les parents et les personnes s’occupant d’enfants les attendent patiemment dans un abri de fortune, sous l’ombre d’un toit de paille. Elles partagent toutes le même désir de protéger leurs enfants contre des maladies potentiellement mortelles, mais évitables. 

Fatima et son fils Mohammed, âgé de 4 ans, s’étaient rendus au centre de santé quelques mois auparavant. Tandis que son enfant malnutri était soigné, elle a été informée de la campagne de vaccination contre la poliomyélite à venir. Elle n’a pas hésité un instant à faire vacciner ses enfants, car elle savait que c’était le cadeau le plus précieux qu’elle pouvait leur offrir. 

« Chaque fois que les agents de vaccination arrivent, j’emmène mes enfants se faire vacciner, et ils sont tous en bonne santé », déclare Fatima.

Goutte à goutte, l’équipe est chargée d’administrer le vaccin antipoliomyélitique oral à l’ensemble des enfants présents afin de les protéger contre la maladie. La poliomyélite peut entraîner une paralysie, voire la mort, si les enfants ne reçoivent pas toutes les doses de vaccin nécessaires.

À la fin de la journée, 180 enfants ont été vaccinés, y compris 29 nourrissons de moins de 12 mois et quelques enfants zéro dose qui n’avaient jamais été vaccinés. Impressionné par ces résultats, Mahmoud confie que les comportements de cette communauté n’ont pas évolué du jour au lendemain. Ce changement est le fruit des efforts continus déployés pendant plusieurs années par des intervenants communautaires en faveur de la santé, des agents de santé et des volontaires en matière d’éducation sanitaire. 

« Nous avons systématiquement mobilisé les membres de la communauté dans le cadre de séances de sensibilisation et d’éducation sanitaire », explique Mahmoud en évoquant les parents et les personnes s’occupant d’enfants. « Nous leur avons expliqué que la vaccination est une forme de protection et leur avons parlé d’enfants de la communauté qui n’ont pas été vaccinés et ont souffert en conséquence. Ils sont par la suite devenus plus favorables à la vaccination. » 

Histoires de réussite

Des dirigeants communautaires, à l’instar du maire de la vallée de Barqiq, ont été associés à cette démarche et sont devenus depuis des promoteurs de la santé de l’enfant, notamment des campagnes de vaccination.

« Il s’agit de notre communauté et de nos enfants, nous ne ménageons donc pas d’efforts pour les inclure dans les campagnes sanitaires et de vaccination de routine », affirme Mahmoud, l’un des héros des initiatives de vaccination qui œuvre en première ligne.

En tout, cette campagne menée dans l’État de Mer Rouge a permis de vacciner plus de 200 000 enfants âgés de moins de 5 ans contre la poliomyélite en quatre jours et, par la même occasion, de leur administrer de la vitamine A. Des campagnes similaires seront lancées dans huit autres États soudanais à haut risque vers la fin du mois de mai 2024 pour s’assurer que tous les enfants vulnérables et accessibles sont protégés, où qu’ils soient.

Contexte des interventions de l’IMEP au Soudan 

Alors que la guerre fait rage au Soudan, des partenaires de l’IMEP, tels que l’UNICEF et l’OMS, ont aidé le pays à endiguer l’épidémie de poliomyélite. 

L’UNICEF assure l’approvisionnement et la distribution des vaccins, et dirige des activités de mobilisation sociale au niveau communautaire pour accroître le recours aux services de vaccination. L’organisation fournit également des orientations aux principales parties prenantes des campagnes de vaccination, telles que les agents de mobilisation sociale, les chefs religieux et les dirigeants communautaires ou encore les médias, concernant leurs rôles. 

L’OMS apporte quant à elle un soutien technique dans le cadre de l’élaboration de microplans, du renforcement des capacités des agents de vaccination, et des activités de suivi menées pendant et après les campagnes de vaccination. Ces actions s’inscrivent dans les efforts continus de l’OMS à l’appui de la surveillance du poliovirus et des interventions techniques visant à prévenir sa propagation et à renforcer l’immunité des enfants, notamment à travers des campagnes de vaccination contre la poliomyélite.